Éolien en mer : 5 propositions pour accélérer aujourd'hui et atteindre au moins 50 GW d'ici 2050
RTE l’annonçait le 25 octobre dernier dans le cadre de la publication de son étude « Futurs énergétiques 2050 » : les énergies renouvelables sont indispensables pour décarboner le mix énergétique et garantir la sécurité d’approvisionnement en France. Dans ce contexte, l’éolien, et plus précisément l’éolien en mer, est un moteur essentiel pour mener la transition énergétique. Lors de sa visite à Saint Nazaire en août dernier, le Premier ministre Jean Castex rappelait les ambitions de la France pour une transition énergétique au profit d’une décarbonation efficace et avait lancé un appel à mobilisation aux acteurs des énergies renouvelables. Pour y répondre, les professionnels de la filière éolienne offshore publient ce jour les résultats d’un travail d’analyse qui montre qu’un objectif de 50 GW d’ici 2050 est réaliste et souhaitable, et qu’il doit être précédé d’un objectif intermédiaire de 18 GW dès 2035. Pour les atteindre, l’ensemble des acteurs de la filière – représentés par France Energie Eolienne et le Syndicat des énergies renouvelables – se mobilisent autour de 5 propositions concrètes pour développer l’éolien en mer en France.
L’éolien en mer, composante incontournable du mix électrique décarboné
Selon la Commission européenne, la filière de l’éolien en mer devrait atteindre une capacité européenne de 300 GW d’ici à 2050. En France, le dernier Comité interministériel de la mer (CIMER), présidé par le Premier ministre, établissait en janvier 2021 que « sur ces 300 GW, la France dispose d’un potentiel de 49 à 57 GW ». L’étude des « Futurs énergétiques 2050 » publiée en octobre dernier par RTE corrobore ces chiffres en présentant divers scénarios dans lesquels l’éolien en mer représente jusqu’à 62 GW.
Au regard de ces chiffres et après une analyse détaillée du potentiel français, France Énergie Éolienne (FEE) et le Syndicat des Énergies Renouvelables (SER) affirment qu’une capacité d’au moins 50 GW en 2050 est atteignable et réaliste pour le mix énergétique français. Pour atteindre cet objectif, FEE et le SER proposent 5 mesures concrètes et ambitieuses qu’il convient de rapidement mettre en place pour replacer notre pays sur la trajectoire qui lui permettra d’atteindre ses objectifs de transition énergétique de moyen et long termes.
Une source de production d’énergie compétitive
Avec 3 500 km de côtes, la France métropolitaine dispose du 2e gisement de vent d’Europe. En termes économiques, l’éolien en mer est aujourd’hui l’une des sources d’énergie les plus compétitives du marché parmi les nouvelles installations de production électrique, le dernier appel d’offres pour un parc de 600 MW au large de Dunkerque, ayant été attribué à un prix de 44 € / MWh.
Cette compétitivité s’explique par le système de complément de rémunération qui garantit une stabilité des revenus pour les producteurs et qui permet de faire face aux fluctuations du marché de l’électricité. Ce système peut amener à reverser à l’Etat la différence entre le prix garanti et le prix de marché. Cette contribution financière, positive au budget de la France, pourrait ainsi représenter pour le pays plusieurs centaines de millions d’euros sur les quinze prochaines années.
Une opportunité de développement économique et industriel en France
Depuis 2010, 600 millions d’euros ont déjà été investis dans les ports français pour permettre l’installation de capacités éoliennes en mer. Indicateur marquant du dynamisme industriel que permet l’éolien offshore, 4 des 12 unités européennes de production d’équipements d’éoliennes en mer sont situées en France. En parallèle, l’éolien en mer flottant est en passe de devenir une spécialité française à forte valeur ajoutée économique : les premiers projets pilotes d’éoliennes flottantes seront mis en service en Bretagne et en Méditerranée d’ici 2023.
Alors que la construction des premiers parcs a débuté, plus de 5 200 emplois sont déjà liés à la l’éolien en mer (source : Observatoire de l’éolien 2021). Plus de 90 % des embauches dans l’éolien réalisées en 2020 par les grandes entreprises et les ETI concernent l’éolien en mer. Dans le même temps, l’éolien en mer revitalise des bassins économiques sous tension avec 4 usines d’éoliennes et de composants déjà implantées en France (Montoir-de-Bretagne, Saint-Nazaire, Cherbourg et Le Havre). Dans le cadre d’un développement visant 18GW en 2035, plaçant la trajectoire nationale dans la moyenne basse des rythmes de développement prévus chez nos voisins européens, la filière prévoit la création d’emplois locaux atteignant 20 000 salariés actifs dans l’éolien en mer sur le territoire national d’ici 2035.
Jean-Louis Bal, Président du Syndicat des énergies renouvelables, indique : « La transition énergétique doit irrémédiablement passer par un développement massif de l’éolien en mer. Le dernier rapport de RTE l’a montré, cette énergie renouvelable, compte tenu de sa compétitivité et de son potentiel, est devenue incontournable pour permettre à la France de réussir cette transition vers un mix énergétique performant et décarboné. Et c’est dès aujourd’hui qu’il convient d’agir très concrètement pour être au rendez-vous lors de la prochaine décennie. »
Nicolas Wolff, Président de France Energie Eolienne, commente : « Les opportunités industrielles grâce au développement de l’éolien en mer sont très favorables à l’économie maritime et aux territoires français avec des milliers d’emplois à la clé. Les futurs parcs éoliens posés ou flottants sont donc essentiels pour assurer la pérennisation des activités industrielles et des emplois associés. Plus encore, les éoliennes en mer permettront la mise en place d’une filière nationale prenant des parts croissantes sur les marchés à l’international. »
5 propositions pour accélérer le développement de l’éolien en mer en France
• Elaborer, en 2022, la planification spatiale du déploiement de l’éolien en mer
Seule une planification précise et anticipée, pilotée par l’État en associant l’ensemble des acteurs du monde maritime, permettra un déploiement ambitieux de l’éolien en mer. L’installation de 50 GW d’éolien en mer au large des côtes métropolitaines ne représenterait qu’une occupation de 2,8 % de l’espace, occupé à usage non exclusif.
• Fixer un premier cap de 18 GW pour 2035
Pour rattraper la trajectoire de développement de l’éolien en mer projetée par au moins 5 des 6 scénarios de RTE, les objectifs de la seconde période de la PPE (2024-2028) et de la loi Energie-Climat doivent être rehaussés pour passer à 2 GW attribués chaque année jusqu’en 2028 puis à 2,5 GW par an jusqu’en 2050. Cette trajectoire est tout à fait réaliste considérant le rythme de développement prévu par nos voisins européens, compris entre 2 GW et 3 GW par an d’éolien en mer.
• Changer l’échelle des projets et de la concertation
Il convient de décloisonner les projets de parcs en mer pour que chaque expérience bénéficie aux suivantes, au profit d’un déploiement vertueux, accéléré et cohérent. En ce sens, la filière propose de renforcer l’information et la concertation des parties prenantes à travers l’organisation des débats publics sur un « programme » éolien en mer à horizon 10 ans pour chacune des 4 façades maritimes.
• Anticiper et entreprendre la transformation des infrastructures
Tout l’écosystème autour des parcs éoliens en mer doit être pensé en amont, avec RTE notamment, pour optimiser les coûts et les usages, à commencer par le développement du réseau électrique associé et des ports. Il faut enfin capitaliser sur les investissements déjà engagés dans la transformation des ports français pour en faire des centres névralgiques économiques ce qui implique de les associer systématiquement aux réflexions liées au développement des infrastructures énergétiques marines.
• Adapter le cadre économique et réglementaire
Tout projet au long cours nécessite de reposer sur un cadre législatif et réglementaire stable, durable et permettant d’engager des objectifs forts et les investissements associés, et d’assurer une meilleure compétitivité.
Nicolas Wolff conclut : « Le développement à grande échelle de l’éolien en mer en France est une solution durable pour le climat et pour l’emploi. Comme pour toute filière dans le secteur de l’énergie, une visibilité à long terme constitue la garantie d’un développement vertueux et ancré dans les territoires, à la condition d’un engagement fort des parties prenantes, qu’il s’agisse des industriels comme de l’Etat. »
Jean-Louis Bal conclut : « Ce qui frappe lorsque l’on regarde les différents scénarios énergétiques publiés ces dernières semaines, c’est le sentiment d’urgence qui en ressort. C’est d’autant plus vrai pour l’éolien en mer qui nécessite, pour réussir, beaucoup d’anticipation : nous devons changer d’échelle et pouvons déployer 50 GW de capacités d’ici 2050, mais il faut agir tout de suite, planifier ce développement avec l’ensemble des parties-prenantes et crédibiliser cette démarche à travers un jalon intermédiaire à 2035. »